Je suis assise sur un banc, face au lac, un livre sur les genoux. Je viens de finir de manger un morceau de pain avec du fromage, de lancer quelques miettes à un pigeon boiteux. Il fait beau, mais pas vraiment chaud, j'ai même un peu frais quand passe un coup de vent.
Arrive un homme d'une cinquantaine d'années, plutôt élégant, qui porte un chapeau. Il désigne le banc pour savoir s'il peut s'assoir. Je fais un signe de la tête et un sourire, et l'homme au chapeau s'assied. Il sort un sandwich de son sac, puis une canette d'Energy Drink, et me demande si j'en veux. Je refuse, mais il me dit dans un français hésitant qu'il en a deux, et que je peux en avoir une. Je refuse encore poliment, mais il insiste, et je finis par accepter.
Il me raconte qu'il est Iranien, et qu'il ne parle pas bien français. Il habite dans le Haut, mais travaille ici, dans un magasin. Il me dit qu'il fait bon aujourd'hui, pas froid, mais pas trop chaud. Je lui demande depuis quand il est en Suisse, il me dit 22 mois. Je ne suis pas sûre de comprendre tout ce qu'il me raconte. Entre chacune des phrases de l'homme au chapeau, je tente de me replonger dans ma lecture, sans jamais réussir à lire plus que quelques lignes.
Un bateau arrive au port, il le désigne en disant : "batu ?". Je corrige : "Bateau, oui, un bateau". Il me dit le mot en farsi, que j'oublie aussitôt, et me demande si "bateau" désigne les grandes comme les petites embarcations. Il me dit qu'en Suisse, le temps et agréable pendant 3 mois, et puis "pluie, neige, il fait froid". Alors qu'en Iran, il fait bon pendant 9 mois, et il ne fait froid que pendant les 3 derniers.
Deux filles passent avec un chien qui semble très intéressé par le bâton que l'une d'elle a dans la main. Elle le lance finalement et le toutou court le rechercher. L'homme au chapeau et moi les regardons. "Suisse, beaucoup chiens. Iran, pas beaucoup. La maison grand, pas bon." Pas sûre de ce qu'il a voulu me dire. Il me demande si j'ai un chien - je n'en ai pas.
Cela fait quelques minutes qu'on est là, à regarder le lac, les gens, à discuter un peu. Finalement, je fais semblant de regarder ma montre - je n'ai pas vraiment d'horaire, puisque je travaille à la bibliothèque. Je me lève, le remercie pour la canette d'Energy Drink, et m'en vais en lui souhaitant une bonne journée.
J'aime ce genre de rencontres imprévues, improbables, étonnantes...
Et vous, quand avez-vous discuté avec un inconnu pour la dernière fois ?
Très joli texte :)
RépondreSupprimerCa me met mal à l'aise quand des inconnu(e)s m'abordent pour discuter, surtout parce que je ne sais pas quoi dire ou comment réagir, et puis la large majorité des fois lorsque ce sont des hommes entre 30-60 ans (on va ratisser large) qui m'abordent c'est parce qu'ils veulent plus que simplement discuter et ils n'hésitent pas à me le faire comprendre. Et je trouve ça répugnant (bon, on dit bien qui ne tente rien n'a rien)...
Laf
Moi non plus, je ne sais jamais trop comment réagir. Mais quand c'est un monsieur sympa comme cet homme, qui ne cherche visiblement rien d'autre que quelqu'un pour discuter un instant, ça ne me dérange pas.
SupprimerLes inconnus ne m'abordent pas ou alors juste pour me demander un renseignement. Je n'ai pas la tête de l'emploi :-)
RépondreSupprimerEh bien il faut croire que moi, je l'ai, car ça m'arrive relativement souvent. Parfois, j'aime bien, d'autres, j'aurais préféré qu'on me laisse tranquille.
SupprimerJe pense que quand on a vécu dans un climat tropical, on est plus habitués à parler avec des inconnus. Moi aussi ça m'arrive assez souvent depuis que je suis revenue du Brésil et ça ne me dérange pas.
RépondreSupprimerPeut-être, c'est vrai que c'est courant, là-bas ! En Suisse, on reste plutôt chacun dans son coin, mais c'est vrai que ça fait du bien d'échanger quelques mots et quelques sourires de temps en temps !
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