samedi 4 juin 2022

Je suis fatiguée

J'ai beaucoup râlé cette semaine, beaucoup crié sur mes enfants, aussi. J'étais fatiguée pratiquement depuis le lundi, et je n'ai pas vraiment réussi à savoir pourquoi. 

Bon, il y a eu le fait que mes enfants son venus à tour de rôle squatter un bout de mon lit pratiquement toutes les nuits. Le grand a regardé des vidéos sur YouTube qui lui ont fichu la trouille (un jeune youtubeur - un jeune c*n - qui prétendait entre autres que si on tape le mot "erratas" sur Google, cela permet à des espions russes d'avoir accès à toutes nos données personnelles, ou un truc dans le genre). Dans la tête de mon petit mec de 11 ans, ça sonnait très réel et ça l'a travaillé pendant plusieurs jours, jusqu'à-ce que je lui explique que c'était des bêtises (OK, j'ai omis d'insister sur le fait que Google, YouTube et compagnie connaissaient déjà nos informations et nos goûts et ne se gênaient pas pour les revendre à droite et à gauche - mais j'ai profité pour lui rappeler qu'il ne devait jamais donner son adresse ou d'autres renseignements personnels sur internet).

Il y a aussi le fait que j'ai des courbatures plutôt douloureuses sur tout le haut du dos : j'ai fait pas mal de vélo le week-end passé, et j'ai fini par sentir les conséquences de cette position, penchée en avant. Et pendant qu'on en est au chapitre des douleurs, j'ai depuis quelque temps très mal aux articulations des gros orteils quand je suis longtemps debout ou que je marche beaucoup. Or, je suis maintenant prof à plein temps et je passe donc une grande partie de mes journées debout devant le tableau. En plus, je vais au travail en train (il y a le trajet jusqu'à la gare) et je monte toujours les deux étages, au travail, à pied (et aussi, les deux étages jusqu'à mon appartement, puisqu'il n'y a pas d'ascenseur). Il faudra que je me décide à appeler le médecin, un de ces quatre.

Enfin, j'adore mon travail, mais certains jours, ça peut être assez éprouvant. J'enseigne le français langue étrangère à des adultes immigrés. J'ai des groupes de personnes qui sont envoyés par le Service de l'emploi du canton, des groupes dans une entreprise, et aussi des cours individuels (certains payés par la personne elle-même, d'autres par le Service de la cohésion multiculturelle). 

Dans les groupes du Service de l'emploi, il y a des niveaux de motivation à apprendre le français très différents selon les personnes. Certains ont presque la soixantaine, vivent en Suisse depuis plus de 30 ans et ont toujours un niveau très basique, surtout à l'écrit. Pas facile de déloger les vieilles habitudes : on peut répéter 25 fois qu'on doit dire "Je bois du café", si ça fait 35 ans que la personne en face dit "Je boire café", elle continuera à le dire comme ça, à moins d'avoir une énorme volonté à s'améliorer. Ce qui n'est généralement pas le cas, puisque ça fait 35 ans qu'elle se fait très bien comprendre comme ça.

D'autres son motivées à apprendre, mais ce sont généralement des personnes qui ont assez peu été scolarisées. Elles lisent très peu, même dans leur langue maternelle, et n'ont pas tous les réflexes que nous avons acquis depuis petits à l'école. Par exemple, comprendre la logique d'un exercice de grammaire n'a rien d'évident quand on ne l'a pas fait des milliers de fois depuis l'âge de 6 ans. Remplir un tableau à double entrées n'est pas non plus si naturel qu'on pourrait le croire. Quant à savoir ce qu'est un verbe... un sujet... et ne commencez surtout par à parler de préposition, vous les perdrez définitivement. (Remarquez, avec ce mot on perd aussi pas mal de personnes qui sont pourtant allées à l'école pendant plus de 15 ans et lisent quotidiennement des centaines d'e-mails et des dizaines d'articles de journaux, alors bon).

J'ai aussi pu constater que certaines personnes ont énormément de mal à suivre une consigne, même relativement simple. L'autre matin, par exemple, j'avais trois élèves, et j'ai dû répéter la consigne d'une petite production écrite quatre fois. Une fois devant le groupe, puis une fois personnellement à chaque participant, quand je suis passée près de chacun et que me suis rendu compte qu'ils ne faisaient absolument pas ce que j'avais demandé. C'est à ce genre de choses que je pensais en disant que cela pouvait être éprouvant.

Bon, j'ai heureusement survécu jusqu'au week-end, et je vais tenter de me reposer un peu, et surtout de me changer les idées. On a une belle sortie de prévue dimanche (j'en parlerai sûrement ici), et on fête les 8 ans de mon P'tit Loup lundi (peut-être aussi un sujet de billet). Et aujourd'hui, on ira peut-être faire un tour à la piscine extérieure pour la première fois de la saison.