lundi 20 avril 2020

L'après

Jeudi dernier, le Conseil Fédéral a annoncé son programme pour la sortie du confinement. Dès le 27 avril, certains commerces et services pourront rouvrir : les coiffeurs et d'autres services de soins à la personne, les jardineries, les magasins de bricolage. Le 11 mai, ce sera le tour des écoles obligatoires et des autres commerces, "si tout se passe bien". Enfin, le 8 juin, les écoles supérieures, les musées et les bibliothèques rouvriront leurs portes. Il me semble qu'ils n'ont pas parlé des bars et des restaurants, mais ce sera probablement lors de la troisième étape.

Les feuilles se déploient

Je ne sais pas trop dire ce que je ressens, après toutes ces annonces. Ça fait quelques jours que la radio nous parle de sortie de confinement, de réouvertures, et je me suis rendu compte que, si ça me réjouissait, ça avait aussi tendance à m'angoisser quelque peu. Je me suis demandé pourquoi ça m'angoissait, et une des réponses, c'est tout simplement que je n'aime pas les changements.

Je suis en adoration devant les couleurs de ces petites fleurs

Ce semi-confinement, c'est devenu la normalité. La routine, maintenant, c'est se lever pas trop tôt, mettre la pâte du pain (pétrie par la machine) au four, déjeuner, m'enfermer dans ma chambre pour travailler pendant que les enfants ont l'école à la maison avec leur papa, préparer le repas de midi, avoir une heure de temps calme, puis une activité avec les enfants, une sortie en forêt... On a créé des petites habitudes qui roulent plutôt bien, on s'y est fait. Pas besoin de préparer les enfants à toute vitesse pour qu'ils ne soient pas en retard à l'école. Pas de train à prendre. Pas de sentiment de culpabilité parce que je ne passe pas beaucoup de temps avec mes enfants. Je me sens plutôt bien, plutôt rassurée.

Anémone des bois juste éclairée par un rayon de soleil

Ça ne veut pas dire que cette situation ne me pèse pas. J'aimerais voir mes parents, être invitée à manger un dimanche avec mes sœurs, que les enfants puissent aller sauter sur le trampoline, jouer avec leur cousin. J'aimerais qu'on puisse tous se serrer dans les bras. Je voudrais que le mariage de ces amis, prévu pour juillet, puisse avoir lieu. Je voudrais aller voir ma petite filleule qui grandit, et avoir une longue discussion avec ma meilleure amie, assise sur un banc avec elle. Qu'on puisse aller boire un café, ou manger une glace, ou aller au restaurant avec cette autre amie qui m'a annoncé une bonne nouvelle, un petit être au creux de son ventre qu'elle espérait depuis si longtemps !

Celui-ci n'a pas résisté aux tempêtes

J'aimerais faire tout ça, mais tout ça me fait aussi un peu peur. D'accord, tous les commerces, le pays entier aura finalement repris du service dès le 8 juin. Mais concrètement, est-ce que ça veut dire que je pourrai embrasser mes parents sans risques ? Que je pourrai de nouveau prendre le train jusqu'à Fribourg sans trop me poser de questions, pour aller voir ma meilleure amie ? Ou alors, est-ce qu'il faudra encore continuer à se tenir à deux mètres de distance, un masque sur la bouche... ? Est-ce qu'on pourra se baigner dans le lac, manger des glaces, faire des balades insouciantes cet été, où faudra-t-il continuer à se méfier de tout ?

Un peu de douceur...

Je suis contente que les commerces rouvrent bientôt. J'ai hâte d'aller faire un tour à la papeterie, j'aimerais aller chez la coiffeuse, et j'irais bien m'acheter quelques jeans. J'aimerais essayer d'aller autant que possible dans les petites boutiques, chez les indépendants, chez ceux qui ont souffert de cette fermeture forcée de deux mois. Nous, nous avons eu la chance de n'avoir vu aucune différence pendant cette période : je ne gagne toujours rien et mon mari reçoit toujours ses allocations de chômage. On n'a donc pas grand-chose, mais on n'a pas moins qu'avant. Et on a moins dépensé, forcément, sans opportunité de sortir, de manger à l'extérieur, d'aller au musée ou à la piscine avec les enfants, sans dépenses pour les vêtements, les trajets...

Ces fleurs sont celles d'un cerisier sauvage tombé à terre. Il a eu la force de fleurir, avant de pousser son dernier souffle...

Bon. L'après viendra. Il ne faut probablement pas s'attendre à ce que tout soit directement « comme avant », mais on finira par retrouver ses marques. On finit toujours par y arriver.

Des feuilles de muguet, encore hésitantes... maintenant, elles ont beaucoup poussé !

20 commentaires:

  1. Je comprends tes craintes. Quand ici on nous a annoncé la réouverture des écoles le 11 mai, j'ai paniqué. Pourquoi ? Parce que je savais qu'il n'était pas possible de respecter les gestes barrière avec des petits, parce qu'au fond de moi la situation me va bien comme ça aussi ! Comme toi j'aime le fait de ne plus avoir à respecter un horaire, de ne plus avoir à me presser, de ne plus mettre de réveil. J'aime profiter de ma maison et de mon jardin. Bien sûr il y a de gros manques, ma fille , ma famille, les gens, mais à part ça ? Rien d'autre ne me manque ! Je suis bien chez moi . Et surtout, j'ai une peur bleue que tout recommence comme avant, comme si de rien n'était, je voudrais tant que tout change, qu'on arrête de surconsommer, de faire voler des avions, de déforester, de tuer, de polluer. Là, on assiste à une trève et finalement j'aimerais bien que ça continue comme ça !

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    1. J'aimerais bien aussi que ça permette aux gens de se rendre compte l'énorme gaspillage et de l'aberration qu'il y a à consommer comme on l'a fait jusqu'à présent, mais malheureusement, je n'ai pas l'impression que quoi que ce soit changera, vu comme les gens se précipitent sur les commandes en ligne pour acheter tout et n'importe quoi.

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  2. Tes photos sont superbes ! Les rayons de soleil sur le muguet et la si jolie fleur du début !

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    1. Merci ! :) J'aime tellement partir en quête de ces petites beautés :)

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  3. J'aime beaucoup tes photos.
    Ce qui me fait peur avec la reprise, c'est de devoir continuer à garder les distances avec les gens dans des transports publics bondés. Me trouver coincée entre des gens potentiellement malades va me stresser. J'ai décidé d'aller voir ma maman le week-end prochain s'il fait beau, histoire de rester dehors et pouvoir garder nos distances.
    Quant aux rituels installés qui te plaisent bien, qu'est-ce qui t'empêche de les garder pour le week-end, une fois que le stress aura repris sa place durant la semaine ?

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    1. C'est vrai que la situation risque d'être compliquée dans les transports publics. En France, ils parlent de prolonger le télétravail là où c'est possible, je ne sais pas si les consignes seront les mêmes en Suisse. Ce serait sûrement plutôt bien pour éviter que tout le monde se retrouve dehors en même temps...

      Je compte bien garder certains des rituels installés après la reprise ! Mais il faudra de nouveau batailler pour qu'ils soient prêts à temps pour l'école, par contre ;)

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  4. J'ai les mêmes craintes et pourtant j,ai tellement envie, besoin, de voir mes enfants et mes petits enfants. Si on n'a pas été contaminés, quel est le risque après le déconfinement ?
    J' apprécie aussi le rythme ralenti, et j'espère que "l'après" tiendra compte du bien-être des humains plutôt que de celui des banques, des financiers et des actionnaires des grandes entreprises. J'espère qu'en France les politiques de santé changeront, j'espère que les soignants, les professeurs, les agents d'entretien... auront enfin droit à la reconnaissance financière à laquelle ils ont droit puisque ce sont eux qui font tourner le pays et non pas nos bureaucrates arrogants. Continue à profiter des moments ritualisés avec tes petits

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    1. C'est vrai que maintenant que cela a beaucoup diminué, les risques de l'avoir contracté sont de plus en plus minces... sauf... si tout le monde se rue les uns chez les autres et recommencent à s'entasser dans la rue, dans les parcs et les transports publics, auquel cas tout va recommencer comme avant.

      Bien d'accord avec toi, ces professions doivent être reconnues à leur juste valeur, et pas seulement par des applaudissements le soir - c'est bien, mais pas suffisant.

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  5. Tes photos sont toujours aussi magnifiques :) Ce que j'espère retrouver un jour, c'est de ne plus avoir peur tout le temps quand je fais des petites choses, comme prendre l'ascenseur, aller faire des courses, dire bonjour à ma voisine dans le couloir, etc. Ce sentiment de peur constante me fatigue et me déprime.

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    1. Je comprends tout à fait ! Les petites choses qui paraissaient gentilles en temps normal (s'approcher de quelqu'un pour le saluer ou l'aider, par exemple) sont maintenant des actions à risques... et c'est bien triste.

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  6. J'ai photographié la forêt et des orobes printaniers (on dit gesses printanières aussi, mais j'ai appris orabes il y a plus de 40 ans!) en pensant à toi!
    ;)
    Autant je n'ai pas envie de reprendre trop vite la vie d'avant, autant je me réjouis de vous retrouver!

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    1. Ah oui, 'gesses de printemps', c'est le nom que j'avais trouvé en cherchant sur internet :)
      Moi aussi je me réjouis de te voir vraiment !

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  7. Je comprends tout à fait ce stress dû au changement et aussi à la crainte réelle du virus avec lequel il faut apprendre à vivre faute de mieux. Mais, pour te donner une autre perspective, c'est bien aussi d'aller quelque part : au Canada, nous sommes en "liberté surveillée" (droit de sortir, mais tout est fermé et l'économie est à l'arrêt) et pour le moment, la position du pays c'est "ça peut durer des mois, on attend le vaccin". Je prends le virus très au sérieux, mais on commence à péter les plombs... et se dire qu'il y en a pour des mois de vie comme ça????

    Bref, y'a pas de situation idéale, quoi que nos gouvernements décident, on saute dans l'inconnu... bien normal d'avoir peur! ;-)

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    1. C'est sûr que la situation ne peut pas durer éternellement... espérons juste que ça se fasse en douceur, sans une reprise du virus.

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  8. Moi aussi, j'apprécie le rythme tranquille de notre vie, mais je me sens de plus en plus enfermée, ne pas pouvoir faire des achats — pas indispensables mais de plus en plus nécessaires – me frustre énormément, je suis triste de ne plus voir mon fils. Si les gens étaient un peu raisonnables, le déconfinement se ferait sans trop de dégâts : les enfants de moins de 10 ans sont très peu contaminés, donc ne sont pas des porteurs sains, contrairement à ce qui avait été annoncé. Et en général, leurs parents sont jeunes, donc rouvrir les écoles maternelles et primaires ne pose pas problème (ah, j'ai constaté que tu sais employer le verbe "rouvrir", en ce moment, j'entends à tout va "réouvrir", qui n'existe pas !) Ceux qui télétrévaillent doivent continuer à télétravailler, pour éviter la foule dans les transports. Les lycéens peuvent rester chez eux, la grande majorité d'entre aux savent travailler en autonomie. Reste la question des collégiens, plus décrocheurs. Et les restaurants, les salles de spectacle qui sont dans une situation catastrophique.
    Si c'est possible, ma première sortie sera pour l'ostéopathe, elle aura du boulot !

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    1. Oui, avec un peu de bonne volonté, ça devrait pouvoir se passer pas trop mal... Mais j'ai quand même peur que l'épidémie reprenne pour une nouvelle vague, et que tous ces efforts aient été en vain.

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  9. J'ajouterai que les hôpitaux, qui commencent à souffler (premier week-end de repos pour ma voisine, qui a travaillé jour et nuit depuis le 1er mars), se préparent maintenant à la prochaine vague début juin, en espérant qu'elle sera contrôlable !

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    1. Oups, j'avais raté ce commentaire, semble-t-il ;)
      La deuxième vague n'est pas encore arrivée, je me demande s'il y en aura une, si on devra tout recommencer, confinement et compagnie, ou si les mesures de distanciation mises en place vont suffire.

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  10. je partage ces drôles de sentiments ambivalents...

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    1. Maintenant, le sentiment de menace et de peur a presque disparu... Il reste une petite crainte au fond de mon esprit : et si ça recommençait ? Mais les beaux jours, les chiffres encourageants ont beaucoup fait diminuer mon anxiété.

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