En ce moment, je n'ai envie de rien faire et je passe beaucoup plus de temps que nécessaire à dormir - du moins en journée, parce que le soir, j'ai beaucoup de mal à décrocher de mes écrans et à me laisser emporter dans les bras de Morphée. Du coup, plus je dors, plus je suis fatiguée, moins j'ai envie de bouger, plus je me traine...
J'ai lu un livre il y a quelques semaines qui m'a fait comprendre beaucoup de chose sur ce que j'ai vécu ces dernières années, une partie des mécanismes qui régissaient ma vie et qui m'ont mené là où j'en étais il y a une année, émotionnellement et psychologiquement. Ce bouquin m'a complètement retournée, j'ai reconnu tellement de choses qui parsemaient mon quotidien sans que je puisse tout à fait mettre le doigt dessus, sans que je puisse les nommer, les expliquer. J'ai pris conscience de beaucoup de choses, ce qui m'a apporté un tourbillon d'émotions contradictoires : du soulagement de pouvoir enfin mettre des mots sur une réalité intangible, mais aussi de la confusion et un peu de douleur.
Ça m'a fait me demander pourquoi j'avais accepté cette situation si longtemps, et pourquoi je m'y étais fourrée pour commencer. J'aurais dû m'en rendre compte, j'aurais dû voir quelque chose, j'aurais dû agir, non ? Probablement que non, parce que ça ne fonctionne pas comme ça, parce que je devais d'abord sortir du brouillard dans lequel j'étais noyée. « Lorsqu'on est au clair avec soi-même, on découvre généralement que la vision que l'on a de l'autre se précise aussi, et que l'on n'a plus envie d'accepter ce que l'on n'était pas trop sûr de trouver normal et légitime ou non auparavant.* » Il n'empêche que l'on ne m'enlèvera pas de sitôt ce sentiment de culpabilité et de honte - après tout, c'est justement ma manière de fonctionner.
Je me pose aussi la question de la responsabilité. Et de la détermination. Prenez la personne dont je parlais dans cet article. Qui a appris depuis toute petite que les relations avec les autres étaient presque toujours conflictuelles, et que le bon moyen - le seul moyen - d'obtenir quelque chose était par la colère ou la manipulation. Qui a vécu des choses tristes, des choses terribles, même, qui n'a pas eu une enfance toute douce dans un jardin enchanté. A partir de quel moment est-ce trop tard pour qu'elle change, pour qu'elle adopte un mode de fonctionnement plus sain, qu'elle réapprenne à faire confiance aux autres comme à elle, qu'elle se rende compte qu'il existe d'autre manières de faire, qui n'impliquent pas de blesser l'autre au passage... ?
Et cette personne, est-ce sa faute après tout, si elle agit comme ça ? N'est-ce pas la faute à son éducation, à ce qui a cloché dans son passé ? Oui, mais alors... est-ce que cela signifie qu'on peut tout pardonner ? Des paroles blessantes aux coups, du vol au meurtre ? Où doit-on mettre la limite ?
J'ai parfois peur pour mes enfants. J'ai l'impression de ne pas avoir su leur offrir un foyer stable, rassurant. J'ai l'impression d'avoir échoué à leur transmettre des valeurs qui sont pourtant les miennes, la compassion, le partage, la négociation, la non-violence. C'est allé si mal pendant si longtemps, je n'arrivais pas. J'ai crié, beaucoup. J'ai hurlé. J'ai fait du chantage, menacé, j'ai pleuré. Je n'arrivais plus à faire autrement... Je regardais le joli mémo que j'avais imprimé, affiché au salon, dont j'aurais tant voulu pouvoir appliquer les conseils. J'essayais de le faire, j'ai vraiment essayé, je l'ai fait parfois, mais la plupart du temps, je ne pouvais pas. J'étais enragée. J'espère ne pas avoir fait trop de mal à mes enfants. J'espère pouvoir encore changer, les changer, les amener vers plus de douceur, moins de colère, moins de cris. Le chemin s'annonce long, mais c'est possible, dites-moi ?
Je me suis un peu égarée dans ce billet, et je suis restée un peu cryptique, vous m'excuserez. J'avais besoin de parler de tout ça d'une manière ou d'une autre, pour que ça arrête un peu de tourner en rond dans ma tête.
*Yvane Wiart, La perversion relationnelle